Fritjof Nansen, le héros national norvégien

 

Toute nation a ses héros et mythes fondateurs mais en Norvège, ceux-ci, à cause probablement de son identité nationale tardive, ont acquis au fil du temps, une signification et un statut hors du commun.
Pour se libérer du passé culturel danois et de la dépendance politique par rapport à la Suède, La Norvège sur l’impulsion de ses élites va mettre en scène dès 1814 son existence en tant qu’entité nationale : les héros seront le ferment d’un élan de solidarité nationale et constitueront les fondations de la Nation Norvégienne mais aussi de la fierté norvégienne.
Qu’ils soient explorateurs, artistes, sportifs, hommes politiques…. Tous ont favorisé la cohésion nationale et le sentiment d’appartenance indispensable à la constitution d’une identité nationale.

Fridtjof Nansen

Fridtjof Nansen est un explorateur polaire, un scientifique reconnu, un sportif de haut niveau un diplomate et cette multi-disciplinarité fait de lui un être à part et sans contexte, le héros de la Norvège moderne.

 

Grâce à son engagement pour bâtir une Norvège nouvelle, faite d’idéaux et d’une volonté d’unir les peuples dans une entraide pacifique, il a cristallisé cet état d’esprit particulier qui a créé la forme la plus haute du sentiment national norvégien.
Il écrit : « Nous ne pouvons nous libérer de l’amour de la terre natale, de notre patrie, de notre peuple. Plus nous avançons en âge, plus cet amour grandit. Il brûle dans nos cœurs à tous, qui que nous soyons, nationalistes ou internationalistes, bourgeois ou prolétaires »
Il a reçu le prix Nobel de la Paix en 1922 pour son travail au nom des victimes déplacées de la Première Guerre mondiale et des conflits liés.

Un homme fasciné par les zones polaires 


Fridtjof Nansen est né en 1891 près d’Oslo. C’est sa mère Adelaïde qui va encourager le petit Fridtjof aux activités en plein air, notamment la pêche et la natation en été, le ski et patinage en hiver où il excelle très rapidement

A l’école, Nansen se distingue en sciences et en dessin pour se spécialiser en zoologie à l’Université d’Oslo.

En 1882, Nansen embarque sur le phoquier Viking dans le but d’observer la zoologie de l’Arctique. C’est au cours de cette expédition de plus de quatre mois que Nansen va développer son attrait pour les zones polaires. A son retour, il devient conservateur en zoologie du musée de Bergen et passera les six années suivantes dans des études scientifiques poussées. Il ponctuera son travail par les visites de grands laboratoires du continent et par un voyage extraordinaire à travers la Norvège de Bergen à Oslo en ski !



Pendant de nombreuses années, Nansen a élaboré un plan pour traverser l’intérieur du Groenland qui n’avait jamais encore été exploré. En 1888, il décide ainsi de traverser le Groenland de l’Est inhabité jusqu’à l’Ouest peuplé. Le groupe de 6 qu’il forma survécut à des températures extrêmes, des conditions de glace très dangereuses mais aussi à une privation extrême.

 

Le navire FRAM

Après le naufrage du navire américain Jeannette au large de la Sibérie et la découverte de ses débris au large du Groenland, Nansen élabora la théorie d’un courant qui transportait la glace polaire d’Est en Ouest. Il mit en pratique cette théorie en faisant construire le navire polaire Fram en 1892.   

Nansen laissa ce navire extrêmement solide et ingénieusement conçu, dans la banquise au large de la Sibérie le 22 septembre 1893 d’où il en sortit en eau libre près du Spitzberg le 13 août 1896, prouvant ainsi l’existence d’un courant transpolaire.

Réalisant que le navire n’atteindrait pas le Pôle Nord, à une époque où la course aux Pôles était encore possible, Fridtjof Nansen décida de quitter le Fram avec son compagnon Johansen, ainsi que 28 chiens, 3 traineaux, et 2 kayaks. Ils atteignirent à skis le 86 degrés 14’ de latitude Nord. Le Fram qui continuait sa dérive atteignit le point le plus au Nord à 85 degrés 57’ de latitude Nord.

Bien que n’ayant pas atteint le Pôle Nord, ce fut un exploit pour l’époque. D’ailleurs, Nansen et Johansen durent ensuite hiverner sur l’île de François-Joseph pendant que le Fram poursuivait sa dérive. Ils furent récupérés par une expédition britannique et ramenait en Norvège. Une semaine plus tard, le Fram et son équipage atteignant la Norvège.

De la figure d’explorateur à celle de héros national

 

Ce voyage fût une grande aventure et une expédition scientifique réussie. La Norvège se dotait enfin d’un héros national et donc une identité. Cette identité norvégienne si recherchée au cours du 19ème siècle alors que la Norvège était encore en union personnelle avec la Suède.

Nansen, lui-même, participa ensuite à l’indépendance de la Norvège en 1905. Il devint très proche du roi Håkon VII et de la reine Maud, premiers souverains de la Norvège indépendante.

Nansen se dévoua ensuite à la diplomatie et devint le premier ambassadeur de Norvège à Londres. Après la première guerre mondiale, il devient président de la Ligue norvégienne de la Société des Nations.
 

En avril 1920, à la demande de la Société, Nansen commence à organiser le rapatriement d’environ un demi-million de prisonniers de guerre. Nansen s’implique dans un nouvel effort humanitaire en 1921 en acceptant le poste de Haut-commissaire pour les réfugiés pour la Société des Nations. Pour les réfugiés apatrides, Nansen élabora le « passeport Nansen », un document d’identification reconnu à l’époque par plus de cinquante gouvernements et permettant aux réfugiés de franchir les frontières en toute légalité. En 1922, Nansen reçût le Prix Nobel de la Paix pour son travail pour le rapatriement des prisonniers de guerre, son travail pour les réfugiés russes, son travail pour porter secours aux millions de Russes affligés par la famine, et, enfin, son travail actuel pour les réfugiés en Asie mineure et en Thrace.

Cet explorateur, ce scientifique, diplomate et humaniste est un héros de la Nation. Il meurt en 1930 et reçoit des funérailles d’Etat le 17 mai 1930, jour anniversaire de la Constitution norvégienne.

 

Virginie, le 03/06/2020